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Actu-Vénissieux / Sports Vénissians

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Devoir de memoire : Arximiro Rico un martyr de l'éducation publique espagnole

L'histoire n'est malheureusement qu'un éternel recommencement. Les hommes ont tendance à oublier les  les leçons du passé.

Pendant la guerre civile espagnole, des crimes ignobles ont été commis au nom du franquisme. Ce coup d’État contre une République dûment élue, de la part de militaires mené par Franco fut soutenu par le Reich allemand et les fascistes italiens. Cette illégitimité criante ne fut pas combattue ni par les socialistes au pouvoir en France, ni par les conservateurs anglais.

La nouvelle démocratie espagnole installée après la mort du dictateur Franco en 1975 a été instaurée sur le déni de mémoire publique.

Alors que l’extrême droite qui se revendique du franquisme renaît de ses cendres en Espagne, il ne faut pas oublier ce que firent ses prédécesseurs au nom d'une « Espagne grande et libre »

Parmi les nombreux martyrs de la dictature franquiste figure Arximiro Rico, instituteur à Baleira, un village non loin de Lugo, ville de Galice. Son crime ne doit pas être oublié.

« Le 1er septembre 1937, la nuit était déjà finie quand les Phalangistes frappèrent à la porte de sa maison. Sa mère le supplia de ne pas ouvrir la porte.  Ceux-ci l’emmenèrent.  Sur le chemin de la Sierra de la Ferradura, les Phalangistes s’arrêtèrent dans une taverne pour boire et, en attendant, ils l’attachèrent à un anneau comme un cheval.  Arrivés au sommet, ceux-ci lui coupèrent les testicules, qu’ils mirent dans sa bouche. Ils lui coupèrent   la langue et enlevèrent les yeux... Puis ils l’achevèrent à coups de fusil de chasse, parce que la tête était défigurée. Son corps fut abandonné à la frontière entre les deux communes. Ils l'ont laissé allonger dans les montagnes afin de répandre le sentiment de terreur »  explique un professeur d'histoire à la retraite au journal espagnol Publico qui dénonce ces méfaits depuis de nombreuses années.

Bien que rien ne puisse expliquer cette ignominie, la paroisse de Castroverde dont dépend Baleira fut le théâtre d'un événement tragique qui contextualise ce crime.  Un an après le coup d'État de 1936, deux gardes civils à la recherche de plusieurs évadés furent tués dans une fusillade, Un fait qui déclenchera une répression féroce dans cette commune galicienne.   Une liste cible 65 innocents, dont 15 seront assassinés. 

Arximiro était un enseignant érudit aux origines modestes, mais aussi un homme de cœur qui prêtait main-forte à ses voisins : il soignait les hommes et les animaux, donnait des conseils sur les cultures et le reboisement, apprenait les quatre règles aux enfants et formait les écoliers... « Il passait pour un rouge, mais c'était un républicain modéré, partisan de Manuel Portela Valladares, qui était à droite de la gauche républicaine d'Azaña », précisait l’un des habitants qui l’ont connu.
Arximiro n'était pas non plus un athée, mais un croyant qui avait banni le crucifix de la classe.  Il ne donnait pas de cours de religion, mais il enseignait le catéchisme à ses élèves pour qu'ils puissent le lire à la maison. Arximiro incarnait le progrès. Son travail socioculturel a transcendé les murs de l'école elle-même : il a créé une chorale, une troupe de théâtre, une bibliothèque mobile…

Pourquoi un homme de bien a-t-il été lynché ?

« J'ai entendu parler de lui depuis que je suis petit, ainsi que de sa mort horrible.  Quand j'allais chez mes parrains et marraines, qui habitaient à Pol, ils racontaient des histoires la nuit.  L'un concernait une bonne personne qui n'avait fait de mal à personne.  Mon parrain a regretté ce meurtre et a été surpris… Les Phalangistes voulaient, en plus de se venger d'un ennemi politique, tuer ce flambeau de lumière et de culture »  explique le doyen de la faculté de La Corogne.
En évoquant « ils » celui-ci se réfère aux pouvoirs en place : le prêtre et, par extension, l'évêché de Lugo ; les caciques, accroupis jusqu'à ce que la mèche de Franco s’allume et les Phalangistes, un groupe d'analphabètes de la région, qui ont utilisé la force plutôt que la raison.
« Il était évident que la diffusion de la culture a contribué à éroder ces leaderships traditionnels. En fait, lorsque son meurtre s’est produit, Arximiro étudiait la médecine, tout en enseignant le matin, l'après-midi et le soir, tout en préparant seuls les diplômés du secondaire et les enseignants. Alors les Phalangistes ont tué l'espoir d'un avenir meilleur pour les gens ordinaires » ajoute Narcisso de Gabriel, doyen de la Faculté des sciences de l'éducation de La Corogne. 

« Les raisons des exécutions étaient d'éradiquer l'esprit de la République incarné dans les enseignants et l'éducation ; provoquer une peur généralisée.  Ces raisons ont été renforcées par la vengeance. Car dans l'exécution d'Arximiro il y avait aussi des raisons personnelles : outre le fait que les bourreaux étaient des voisins, et non des hommes de main venus d'ailleurs, il avait eu des frictions avec le prêtre de San Martín, dont le frère était un avocat phalangiste arrivé à être maire de Lugo » explique le prologue des « Enseignants de la République » de María Antonia Iglesias

Sources : Muerte de un maestro republicano d’Henrique Mariño – Journal « Publico » du 12 mai 2017

La République Espagnole fut abandonnée à son sort par les démocraties européennes - Photo : DR

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